La lutte traditionnelle a plusieurs fonctions dans la société nigérienne : sociale, politique et culturelle. Il s’agit d’une occasion pour la population de se rassembler et de mettre de côté leurs différends.
Les enjeux politiques qui incombent au Niger, tel que le terrorisme, sont momentanément oubliés lors de championnats de lutte. « Il y a des soucis politiques qui sont mis à l'écart pour laisser place aux jeux, aux spectacles et aux combats de lutte traditionnelle », déclare le journaliste sportif de Radio Télévision Bonferey, Abdoulazize Mamadou.
La lutte traditionnelle est née dans les campagnes pour célébrer les récoltes, explique le directeur technique de la Fédération nigérienne de luttes (FENILUTTE), Malam Barka Akoda. « Les jeunes s'organisent pour aller de village en village pendant des mois de combat. Ils exhibent leurs corps, leur accoutrement, ils dansent, ils impressionnent les filles et créent même des mariages et des amitiés », précise-t-il. M. Barka insiste sur le fait que ce sport est « prisé par les vieux, les jeunes, les femmes, les religieux, [et que] tout le monde accepte la lutte dans la société ».
De national à continental
Des compétitions sont également organisées, une occasion de plus pour les lutteurs et lutteuses de fraterniser entre eux. La plus célèbre est le Sabre national, championnat de lutte du Niger. Elle réunit les huit régions du pays, chacune représentée par dix lutteurs et lutteuses se lançant à la conquête du trophée national. Le but ? Terrasser son adversaire.
L'État accorde une très grande importance à la discipline : « C'est pas moins de 300 millions de francs CFA [environ 660 000 dollars canadiens] qui sont injectés dans l'organisation du sabre national », soutient Abdoulazize Mamadou.
La lutte, pratiquée dans de nombreux pays d'Afrique, fait également l'objet de compétitions à l'échelle continentale. Parmi elles, le TOLAC, le Tournoi de Lutte de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, réunit 14 pays de cette région. La prochaine édition aura lieu du 17 au 19 mars prochain à Niamey, la capitale.
Manque d'innovation
Malgré la création de quelques écoles et la mise en place d'un code de la lutte, la discipline a encore besoin d'innovations si elle veut réellement se professionnaliser, pense Abdoulazize Mamadou. Elle peine encore à se démarquer sur la scène internationale, regrette le journaliste. Il justifie cela par la réticence de la population, souvent analphabète : « Ils voient en ça un nouveau système, une nouvelle forme de lutte qui va la rendre moins authentique (sic.)», explique-t-il. La FENILUTTE travaille actuellement pour sensibiliser davantage les milieux ruraux sur l'importance de la professionnalisation de la discipline.
Le directeur de la fédération, quant à lui, reste confiant en l'avenir de la lutte traditionnelle au Niger:« Jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à demain, cette tradition-là, dans beaucoup de régions, ça continuera ».
Illustration: Naïla Houde