Les événements d’ultramarathons ont explosé en popularité dans les dernières années. Le concept est assez simple : des courses dont la distance s’étend de 50 à plus de 600 kilomètres. Rien qu’en Amérique du Nord, le nombre d'événements de ce genre est passé de 191 à 1864 en 24 ans, rapporte annuellement le magazine américain Ultra Running. Cette popularité est notamment due à la présence massive des adeptes de ce sport extrême sur les plateformes numériques, comme Instagram, TikTok, ou YouTube.
Ce phénomène a pris de l’ampleur grâce aux multiples athlètes qui documentent leurs entraînements ou leurs courses sur leurs réseaux sociaux. Certains cumulent des milliers d’abonnés et abonnées. C’est le cas de Victor Guerdin, un coureur français arrivé cinquième à l’Échappée Belle 2025 - Traversée Nord, un ultramarathon de 96 kilomètres. Révélant des conseils sur son sport à sa communauté de 50 000 personnes sur Instagram, il se considère comme un « athlète-créateur ». Il voit les réseaux sociaux comme « une manière de raconter l’ultra-trail autrement : en mêlant performance, science, et un peu d’humour. »
En ultramarathon, l’effort physique et le combat mental sont solitaires. Avoir les yeux de milliers de personnes rivés sur ses résultats peut être une pression supplémentaire. C’est ce qui pousse Victor Guerdin à être plus rigoureux et à donner le meilleur de lui-même : « Le fait d’exposer ses objectifs et ses entraînements crée une forme de responsabilité vis-à-vis de la communauté », affirme-t-il. Il ajoute que sa communauté ne le suit pas à la base pour des résultats sportifs et qu’il ne ressent pas une pression de résultat importante de leur part.
Réseaux sociaux : passe-temps ou gagne-pain ?
Victor Guerdin pense ainsi qu’un minimum de présence sur les réseaux sociaux s’impose : « Pour la majorité, la visibilité numérique est devenue un levier essentiel, que ce soit pour trouver des commanditaires ou développer des projets personnels ».
Nicolas Danne, un coureur français qui vit à Montréal, partage également sur les médias sociaux des photos et vidéos de ses courses. Sur ces plateformes, il fait la promotion d'événements liés à son poste de représentant technique chez On, une marque de chaussures de course. Son avis sur la question est clair : il est impossible de vivre du sport sans présence sur les réseaux sociaux.
Un risque de banalisation
La médiatisation rapide de ces courses dans les dernières années amène un questionnement sur la banalisation de cette discipline extrême. Victor Guerdin place cette réflexion au cœur de sa démarche lorsqu’il documente ses courses.
« L’ultra-trail est une discipline exigeante qui demande des mois, voire des années, de préparation. Mon rôle, à travers mes contenus, n’est pas de banaliser cette pratique, mais justement de rappeler la rigueur, la patience et l’humilité que demande l’ultra-trail », explique l'athlète.
Nicolas Danne, lui, affirme qu’il faut du temps au corps pour s’adapter au type d'effort que demandent les ultramarathons. « C'est un gros problème… Les gens pensent que c’est facile et qu’on peut faire des ultramarathons du jour au lendemain alors que non. » Selon lui, c’est en partie de la faute d’une multiplication de contenu sur les réseaux qui, en mettant de l’avant le sport de façon plus ludique, le banalise en même temps. Comme il le dit lui-même, la mise en lumière de ce sport est « pour le meilleur et pour le pire ».