Le 22 août 2025, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) du Burkina Faso a annoncé l’arrêt immédiat de « toutes les activités du projet Target Malaria » sur l’ensemble du territoire burkinabé.
Le consortium international a subi un raid initié par le gouvernement dans un de ses laboratoires après plusieurs alertes lancées par divers organismes, dénonçant les pratiques controversées de cette organisation. Le chercheur principal mondial pour Target Malaria, Austin Burt, se montre conciliant : « […] notre priorité est désormais d'écouter et de maintenir le dialogue avec le Burkina Faso. »
Target Malaria ne souhaite pas émettre de commentaire autre que la déclaration des porte-paroles de l'organisation publiée le 28 août dernier. L’organisation a déclaré regretter « l'interruption de plusieurs années de travail mené par et avec l'équipe burkinabè » et compte maintenir sa volonté de continuer les recherches pour lutter contre le paludisme.
Une situation d’urgence
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), 263 millions de cas de malaria ont été recensés en 2023, comprenant 597 000 décès. Bien que plusieurs cas soient recensés en Amérique du Sud ainsi qu’en Asie du Sud-Est, plus de 90 % des décès proviennent d’Afrique subsaharienne. Le Burkina Faso n’échappe pas à la règle et reste un État dans lequel la malaria demeure un problème de santé publique dans le pays.
« La malaria (ou paludisme) est une maladie causée par un parasite appelé le plasmodium et transmis par un moustique femelle du genre de l’anophèle », indique le professeur et chercheur de l’École de santé publique de l’Université de Montréal, Thomas Druetz. Ce dernier note que les symptômes de la malaria sont multiples. « Outre la fièvre, il peut y avoir des complications neurologiques pouvant provoquer des comas et souvent le décès », explique-t-il.
Une méthode controversée
Créé en 2012, Target Malaria est une association d’organisations internationales de recherche à but non lucratif, financée en partie par la Fondation Bill-et-Melinda Gates, et ayant pour objectif d’éradiquer la maladie dans plusieurs pays d’Afrique.
Target Malaria expérimente le forçage génétique sur les populations de moustiques Anophèles en rendant les femelles stériles par une souche de mâles fertiles génétiquement modifiés. L’objectif final étant de réduire drastiquement la population de moustiques vecteurs de la malaria.
Au Burkina Faso, plusieurs collectifs et organisations luttent depuis plusieurs années pour interdire cette pratique dans leur pays. C’est le cas de l’organisation Terre à vie et de son président, Ali Tapsoba, qui « salue la décision du gouvernement », lors d’une entrevue accordée à l’émission Le Journal du Dimanche Soir sur la chaîne de télévision 3TV. Ce dernier estime que le Burkina Faso est devenu « un pays cobaye à ciel ouvert par rapport à ces expérimentations hasardeuses. » Selon l’activiste, l’impulsion génétique reste une technologie aléatoire et Target Malaria n’a pas pris en considération l’avis des membres des villages dans lesquels ils agissent.
Le professeur Thomas Druetz reste quant à lui mesuré sur l’efficacité de cette méthode et maintient quelques craintes quant aux répercussions potentielles de celle-ci. « Il se pourrait que cet organisme soit très compétent pour transmettre une autre maladie. On ne sait pas encore très bien les répercussions potentielles d’un organisme génétiquement modifié. »